Cet article est la suite de celui-ci:
Selon l’Ayurveda, tout dans le monde, y compris l’être humain, est composé d’une combinaison des cinq grands éléments représentant les différentes qualités de l’énergie :
- l’ether, le plus subtil, assimilé à l’espace,
- l’air, élément gazeux impalpable, léger, clair, sec, qui se disperse ;
- le feu, qui a le pouvoir de changement, avec des qualités de chaleur, de sécheresse et un mouvement ascendant ;
- l’eau, liquide, froide, coulant vers le bas, sans forme propre ;
- et la terre, solide, avec les qualités de lourdeur, de dureté et un léger mouvement vers le bas.
Ces cinq éléments se combinent en paires pour former trois énergies vitales appelées dosha :
- éther + air = vata, avec prédominance de l’air, gère les mouvements physiques et physiologiques, la circulation et le système nerveux ;
- feu + eau = pitta avec prédominance du feu, gère la transformation (réactions enzymatiques, métabolisme) ;
- eau + terre = kapha, avec l’eau comme élément fondamental, gère la structure du corps, donne force, vigueur et stabilité.
Les qualités de ces trois énergies se combinent différemment en chaque individu, et leur influence varie selon le moment de la journée, notre environnement, ce que nous mangeons, pensons, vivons, ainsi que selon les saisons et les différents cycles de notre vie.
Selon l’Ayurveda, la quantité de sommeil dont nous avons besoin dépend de notre constitution doshique:
- Les personnes de type kapha ont besoin de plus de sommeil, environ 8 à 9 heures pour se sentir reposées ;
- 7 à 8 heures suffisent à celles de type pitta, et
- 6 à 7 heures pour celles de type vata.
Notre besoin de sommeil dépend également de notre âge :
- un bébé peut dormir jusqu’à 16 heures par jour,
- les enfants jusqu’à 10 heures,
- alors que les personnes âgées peuvent se contenter de 5 ou 6 heures de sommeil.
L’Ayurveda considère l’enfance comme le stade kapha de la vie, l’âge adulte comme le stade pitta et la vieillesse comme le stade vata.
Selon la conception ayurvédique, la terre passe deux fois quotidiennement par les stades vata, pitta et kapha. Ces deux cycles quotidiens sont :
Premier cycle :
- 6h/10h : période kapha : le corps est lourd, lent, détendu, il peut y avoir des mucosités.
- 10h/14h : période pitta : énergie, appétit le plus fort (pitta gère le métabolisme alimentaire).
- 14h/18h : période vata : énergie intellectuelle.
Deuxième cycle :
- 18h/22h : période kapha : l’énergie redescend avec le soleil.
- 22h/2h : période pitta : reconstruction des tissus.
- 2h/6h : période vata : la meilleure période pour se lever car on est léger, l’esprit est plus clair, c’est le moment idéal pour la méditation.
Étant donné la propriété naturelle de lourdeur de kapha, il est plus facile de s’endormir, et la qualité du repos est meilleure, si nous allons au lit vers 22h. Et en effet, très souvent nous commençons à nous sentir fatigués déjà aux alentours de 21h, mais nous n’en tenons pas compte car nous sommes occupés à faire une chose ou l’autre, ou bien nous regardons la télévision. Pourtant, si nous nous mettions au lit à ce moment-là, notre sommeil serait plus profond et de bien meilleure qualité, et nous nous sentirions aussi mieux reposés à notre réveil.
Comme le cycle pitta commence à 22h, et que pitta induit la vigilance mentale, nous nous mettons à penser à toutes sortes de choses que nous devrions encore terminer avant d’aller dormir ! Aux approches de minuit, la faim commence à se faire sentir (ce qui est typique de pitta) et nous mangeons un bout, ce qui fait que nous allons au lit le ventre plein, ce qui nous empêche de nous endormir !
De 2h à 6h environ, c’est la phase vata qui se caractérise par son aspect léger et aérien, c’est pourquoi notre sommeil est léger, et en même temps plein de rêves. Ce n’est pas le genre de sommeil qui nous trouvera frais et dispos à notre réveil.
En résumé, une journée idéale vécue en harmonie avec les rythmes naturels serait donc composée ainsi :
- lever entre 6h et 8h
- déjeuner entre 12h et 13h
- dîner entre 18h et 19h
- coucher entre 21h30 et 22h30
Les causes d’insomnies selon l’Ayurveda
La plupart des insomnies sont dues à un excès de vata, et le problème est que l’insomnie elle-même augmente vata. Cela entraîne un cercle vicieux dans lequel vata vous empêche de dormir, et ne pas dormir augmente vata.
Les signes d’un déséquilibre de vata sont l’anxiété, la peur et l’agitation. La cause peut en être un excès d’exercice physique ou sexuel, un régime alimentaire trop léger ou un jeûne, de même que le fait d’aller se coucher trop tard.
Tout cela entraîne une agitation du système nerveux central.
Pour remédier aux problèmes de sommeil
- Essayez d’avoir un horaire quotidien régulier, d’aller au lit, de vous éveiller et de prendre vos repas à heures régulières. L’Ayurveda appelle cela « dina charya », routine quotidienne, et c’est l’un des moyens les plus efficaces pour conserver ou restaurer l’équilibre de vata.
- Entre 16h et 17h, buvez un verre de jus de tomate additionné de deux cuillers à thé de sucre brut et de 2 pincées de noix de muscade.
- Mangez des aliments apaisants à votre repas du soir. La plupart devraient être chauds, bien cuits et substantiels : laitages, céréales complètes (spécialement du riz et du blé), fruits doux et légumes cuits. Evitez les aliments très légers et froids.
- Prenez ce repas tôt (entre 18h et 19h) et passez une soirée tranquille.
- Avant d’aller au lit, buvez une tasse de lait chaud additionné d’une pincée de noix de muscade, ou un peu de poudre d’amandes + une pincée de noix de muscade + une pincée de cardamome. A noter que la noix de muscade convient mieux au type vata, la cardamone au type pitta et le gingembre séché au type kapha.
- Juste avant d’aller au lit, mettez ¼ de cuiller à thé du mélange suivant dans un peu d’eau chaude : 1 part de tagar (valériane indienne), 1 part de poudre de racine de valériane, et 1 part de camomille.
- Bain ou douche chauds apaisent vata.
- Avant d’aller au lit, massez vos pieds pendant quelques minutes avec de l’huile de sésame, du ghee fondu ou de l’huile d’olive. Si vous êtes du type pitta, prenez plutôt de l’huile de noix de coco qui est refroidissante. Essuyez avec un linge frais. Cela aura un effet calmant sur le centre du sommeil du cerveau. Ou bien, massez-vous avec de l’huile de jojoba ou d’amande douce agrémentée de quelques gouttes d’huile essentielle de lavande : prenez une très petite quantité d’huile dans votre paume de main, et massez-vous des genoux jusqu’aux orteils, et des coudes jusqu’au bout des doigts, de haut en bas.
- Méditez : la méditation permet à l’esprit de s’apaiser (voir Cahiers n°4, p. 10).
En conclusion
Nous passons en moyenne un tiers de notre vie à dormir. C’est dire le rôle essentiel que joue notre sommeil, dont une carence permanente, en qualité, se répercute sur la santé, et sur la vie sociale, affective et professionnelle.
En effet, sur le plan physique, l’organisme s’affaiblit et il est donc moins résistant aux maladies, les digestions sont difficiles et lentes, une somnolence se manifeste à tout moment, tout effort physique coûte. Un mauvais sommeil accélère en outre le vieillissement par usure, du fait d’une non-réparation de l’organisme dont le sommeil est « l’atelier d’entretien ».
Sur le plan psychique et affectif, l’équilibre vital est rompu, la nervosité s’installe, avec aussi l’anxiété, l’instabilité, la dépression, et l’agressivité. Sur le plan intellectuel, des troubles de la mémoire se font sentir, ainsi qu’une torpeur intellectuelle et une difficulté à se concentrer.
Pour la plupart d’entre nous, il suffirait pourtant de nous mettre à l’écoute de nos sensations et de respecter nos rythmes internes. C’est la condition pour retrouver le royaume oublié du sommeil qui nous ouvre les portes d’une vie plus sereine, vécue en pleine possession de nos moyens, et en harmonie avec la Nature, dont nous faisons partie !
« Aussi loin en vérité, que cet espace (extérieur) s’étend, aussi loin s’étend l’espace à l’intérieur du cœur. En lui sont contenus à la fois le Ciel et la Terre, le feu et l’air, le soleil et la lune, l’éclair et les étoiles. Tout ce qui existe en ce monde et tout ce qui n’existe plus ou pas encore, tout cela est contenu en lui. »
(Chandogya Upanishad, VIII, 1,3)
Nicole Eraers est l’auteur de cet article.
Sources: Texte: Les Cahiers du Yoga n°5 – Images: Bekha ©
Voici les 2 commentaires publiés sur cet article en 2010:
1. Hélène a dit: Ouvert 5 juin 2010
Bonjour, merci pour cet article. Je n’ai pas trop de problèmes de sommeil, sauf qu’il faut que je dorme mes 8h…
Les heures indiqués ici sont-elles les heures solaires? 22h en Bretagne ce n’est déjà pas tout à fait pareil que 22h en Alsace… Et le passage heure d’été:heure d’hiver?
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2. Michèle a dit: Ouvert 6 juin 2010
Bonsoir Hélène,
Oui, bien sûr, il y a toujours ce fameux décalage par rapport à l’heure solaire à prendre en compte…
Mais il est impossible de tout calculer montre en main. Ce sont des indications, de grandes lignes. Et je trouve que l’on peut réellement sentir ces différentes phases de la journée et de la nuit.
Personnellement, je sens le décalage est-ouest, puisque je suis arrivée de l’est il y a 2 1/2 pour vivre en Bretagne.
Cela fait longtemps que je me lève tôt pour la méditation, … mais j’ai senti la difficulté à me lever à la même heure en Bretagne, puisque le soleil s’y lève presque 1 heure plus tard qu’en Haute-Savoie. Et, j’ai dû modifier légèrement mon horaire de lever-coucher pour être en phase avec la nature… et parce que cela m’était possible.
Ici le matin, je ne sens pas de la même façon la lourdeur des premières heures Kapha qu’aux mêmes heures en Haute-Savoie.
Par exemple, si je me lève une fois de temps à autre à 8h pour le plaisir d’un plus long repos, parfois nécessaire, je suis relativement fraîche et dispose, comme si les heures Vata n’étaient pas tout à fait terminées et m’invitaient encore à la méditation…
Les rythmes de la nature ont une influence indéniable sur nous.
Oui… les cassures de ces rythmes influencent notre équilibre global; cela est un fait reconnu par de nombreuses approches alternatives de la santé. L’homme moderne est bien trop souvent déconnecté de la nature, de ses propres rythmes et besoins, aussi…
super article qui est cependant contradictoire par moment.
Par exemple, à un moment le texte énonce qu’il faut se lever en période vata entre 2h et 6h et un peu plus loin, il préconise de se lever entre 6h et 8h wtf ????
Je pense que l’auteur fait une proposition pragmatique, tout simplement; car relativement peu de gens sont prêts à se lever avant 6h.
Si l’on se lève tôt, on est encore un peu dans les heures Vata. Le réveil est plus facile. On est plus frais que si l’on fait la grasse matinée!
Très très intéressant! Je comprends beaucoup de choses… Je vais approfondir cela avec la médecine ayurvédique. Merci de l’avoir partagé!