Voici une histoire à propos de la fascination des biens matériels, trouvée dans « Un français dans l’Himalaya, itinéraire avec Ma Anandamayi« , textes rassemblés et présentés par Jacques Vigne.
Swami Vijayânanda trouvait cette histoire si importante qu’il disait en souriant qu’on devrait l’afficher dans toutes les chambres de tous les âshram…
Il était une fois un guru qui avait un très bon disciple, un brahmacharin qui était inspiré par l’esprit de renoncement: il ne possédait rien, si ce n’est un kupinam (Kupinam, linge servant de caleçon, le vêtement minimum). Un jour, son guru lui dit:
«Tu vas te rendre dans un endroit isolé pour t’y consacrer à la méditation. Je te donnerai un mantra et je viendrai voir dans quelques années comment ça va.»
Alors notre jeune homme est parti et s’est mis à pratiquer la méditation selon les instructions de son guru. Son programme journalier était le suivant: le matin il se levait, lavait son kupinam, le faisait sécher sur l’herbe, puis commençait sa méditation.
Ensuite, vêtu de son seul kupinam, il allait au village pour mendier sa nourriture; il revenait pour le repas et s’asseyait de nouveau pour la méditation.
Un jour, un rat ou une souris fit des trous dans son kupinam. Notre brahmacharin était désespéré; c’était sa seule possession. Il l’a raccommodé tant bien que mal et, en mendiant sa nourriture au village, il a dit aux gens qu’il n’avait plus de kupinam. Les villageois lui dirent:
«Cela ne fait rien, on va te donner un autre kupinam!»
Ainsi fut fait. Il était tout à fait heureux avec son nouveau kupinam, et il a recommencé son programme journalier. Quelques jours après, la même histoire s’est reproduite.
Une souris a de nouveau fait des trous à son kupinam; il va de nouveau au village et redemande un kupinam que les villageois lui ont volontiers donné. Cette histoire est arrivée deux ou trois fois. Finalement, les gens se sont fatigués et lui ont dit:
«Bâbâ, on ne va pas te donner tous les jours un nouveau kupinam! On va te donner un chat, tu le garderas près de toi, le chat chassera les souris et celles-ci ne viendront plus manger ton kupinam!»
Le brahmachârin a alors emmené son chat, et les souris se sont éloignées. Il était tout heureux, son kupinam n’était plus déchiré par les souris. Seulement voilà, il y avait un autre problème. Il fallait nourrir le chat, lui donner du lait. De ce fait, quand il allait au village, il demandait aux gens:
«S’il vous plaît, donnez-moi aussi un peu de lait pour mon chat.»
Les villageois lui ont donné volontiers du lait pour le chat. Cela s’est reproduit plusieurs jours, pendant une semaine ou deux, et les villageois ont fini par se fatiguer.
«Eh, Bâbâ, on ne va pas te donner tous les jours du lait! On va te donner une vache, tu vas la traire et tu auras du lait pour nourrir ton chat.»
Alors il a emmené la vache, a apprit à la traire et ainsi il a eu du lait tous les jours pour lui et pour son chat.
Mais un nouveau problème est apparu: il fallait nourrir la vache. Quand il allait mendier, il demandait aux villageois de lui donner du foin pour nourrir sa vache. Les villageois lui ont d’abord donné du foin, puis finalement se sont lassés et lui ont dit:
«Eh, Bâbâ, on ne va pas toujours te donner du foin! Il y a des terres en friche près de ton âshram. Tu vas les cultiver, on va te donner du blé à semer, il va pousser, tu auras du blé pour faire tes roti (Roti, galette de froment), et tu auras de la paille pour ta vache.»
Alors il a dit oui, car il était obéissant et très influençable, comme beaucoup de brahmachârin et de sâdhu. Il a fait cela, récolté son blé, en a semé une partie à nouveau, a commencé à stocker de la paille.
Finalement, au cours des années, il n’a plus pu faire le travail lui-même. Il a dû demander aux villageois des hommes pour l’aider. Au début, il lui en ont donné, mais après ils lui ont dit:
«Bâbâ, on va te donner une femme, tu vas te marier avec elle, elle t’aidera, elle te donnera des enfants et les enfants t’aideront à leur tour.»
C’est ce qu’il a fait, et petit à petit son âshram s’est transformé en une grande propriété, avec des greniers pour le foin et le blé, des ouvriers comme dans une entreprise. Un jour, son guru est venu. Il a vu la ferme, avec des gens occupés à droite et à gauche. Il a demandé à un homme:
«Dis donc, j’avais mis un brahmachârin ici, qu’est-il devenu ? Est-il parti?»
L’homme répondit :
«Non, non, il est debout là-bas.»
Notre brahmachârin était habillé comme tout le monde, il donnait des ordres à ses ouvriers. Son guru s’est approché de lui. Quand le brahmachârin l’a vu, il est tombé à genoux et a dit :
«Guruji, regardez! Tout ça, c’est à cause d’un kupinam!»
Rencontrer Swami Vijayananda, de son vivant, en vidéo:
Merci à Béatrice qui m’a rappelé cette jolie histoire du Kupinam!
Source de l’image: Sadhu et son kupinam: Wikipedia
Merci, Michèle. C’est une belle histoire, qui fait d’abord sourire car on voit ce qui s’enclenche, et puis qui fait réfléchir.
Bizarrement, cette lecture m’a de suite donné l’envie de proposer un lien vers une version de « Jean le Veinard », un des contes collectés par les frères Grimm, un peu comme pour confirmer ce conte de caleçon… en le détricotant
http://www2b.ac-lille.fr/weblettres/productions/prog6/jean_le_veinard.htm
Sibylle
Bonjour michèle,
Merci de faire partager cette histoire que j’aime beaucoup sur ton blog.
Bonne journée ensoleillée 😉
A bientôt
Bonjour Michèle,
très belle histoire à partager !
Om Shanti Om,
ici Petit Scarabée en TTC…
Bon TTC Petit Scarabée!
Si jamais tu la connais (elle est dans le groupe francophone probablement), salue Louisa, qui doit y être aussi.
Namaste et bonne inspiration pour ce moment intense,
Michèle
Merci, Sibylle. Je viens de lire le conte avec un peu de retard. C’est une belle histoire!
Bonjour transmis à Louisa et son visage s’illuminé !
Merci Petit Scarabée,
A l’heure qu’il est, vous devez être rentrées…
Namaste
Oui Michèle !
Depuis dimanche, très bonne expérience de grande intensité.
Maintenant c’est la phase d’intégration…
Merci pour ton soutien,
Om Namah Shivaya
Bonne intégration, donc…
Ceci dit, le temps contribue réellement à infuser. La phase d’apprentissage est relativement brève: les pratiques de base sont somme toute relativement simples. Mais s’en imprégner plus profondément et les vivre pleinement… c’est l’objet d’une vie toute entière!
Namaste!
Michèle